France Province + Inspiration
Je me rapprochais de mon ambition: j'étais devenu secrétaire d'un romancier. Au cours d'un banquet, mon père avait parlé avec son voisin de table de moi et de mon prochain départ pour Paris, où je n'avais pas encore d'emploi. Ce monsieur lui avait proposé de me recommander à un de ses amis écrivains qui cherchait précisément un secrétaire. Il s'agissait d'un homme bien oublié aujourd'hui, Binet-Valmer. Il publiait chaque année, alors, un roman en feuilleton dans le Journal, un ou deux autres dans les Œuvres libres de Fayard, et à peu près un conte par semaine, ailleurs. Mais il n'était pas tellement connu par la valeur de ses oeuvres que par son activité mondaine et politique. Il était — à l'époque c'était quelque chose d'important — président de « la Ligue des Chefs de section et des Anciens Combattants ». Je croyais devenir le secrétaire d'un écrivain. Pas du tout. On m'a mis dans un petit bureau où s'entassaient deux dactylos, dont la secrétaire de Binet-Valmer, et un monsieur qui était vaguement secrétaire de la ligue. Il m'a fait copier, en une vingtaine d'exemplaires chaque, et à la main, des quantités d'adresses. Tout cela pour rassembler, le cas échéant du jour au lendemain, des chefs de section et des anciens combattants. C'était l'époque où il commençait à y avoir des mouvements sociaux contre Poincaré, la Chambre bleu horizon venait d'être élue. Une fois de plus, je tombais exactement du côté contraire à mes convictions."
Ailleurs, on apprend de BV qu'"il se mêlait en même temps à la politique active et fut, dans de nombreuses conférences, un des orateurs de l'Action française"
Un bien étrange monsieur donc...